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Silence

/web/photos/2014.Silence2_YvesKerstius.pngEst-ce qu’elle a des cheveux blancs ? Est-ce qu’elle regarde "Les Feux de l’amour"? Est-ce qu’elle est toujours vivante? Deux jeunes femmes en tablier blanc sont assises derrière une table. Elles jouent à "Il" ou "Elle". Leur pause terminée, elles amènent sur un plateau roulant une brochette de marionnettes de papier. L’enseigne "Maison de repos" s’allume. Certains pensionnaires sont insoumis, d’autres veulent prendre toute la place. Pas un mot et déjà un humour ravageur, avant de passer à la troisième dimension. "Silence" frôle le chef-d’œuvre. Entre autres grâce à l’hyperréalisme de ses marionnettes, inspirées des sculptures en silicone de l’Australien Ron Mueck. "Les vieux" ne parlent pas, caressent un chien rebelle de table, leur sucrier en réalité. Révélateur du passé mais aussi d’un certain esprit, leur intérieur, un appartement dans le home, trahit leurs habitudes, leurs personnalités. Une vraie tendresse émane de ces deux personnages. Et lorsqu’on la croit protectrice envers lui, elle sert le thé sur une tasse renversée. Première faille. Puis un jour, il branche l’enregistreur. " Pour faire des galettes à ma façon…" et la voix de la bien-aimée grésille tandis qu’il s’applique à cuire les gaufres pour un anniversaire et ne lésine pas sur la crème fraîche. "Tu crois qu’il aurait préféré partir avant elle ? Peu de mots, des gestes justes, une émotion intense, une immense complicité entre les marionnettistes et leurs créatures, la fin de vie racontée avec sensibilité, en évitant la sensiblerie, et un public bouleversé.

« Silence » par le Night Shop Théâtre, mise en scène de Bernard Senny. Créé à Huy aux Rencontres théâtre jeune public 2013. Reprise à l'Eden du 27 au 29 janvier, au Théâtre royal de Namur du 3 au 12 février, au National du 19 au 24 mai.

par le Night Shop Théâtre

Yosh

/web/photos/2014.Yosh_NicolasBomal.pngDanse hybride, autobiographique et formidablement humaine, « Yosh » raconte la vie, la rencontre entre différentes cultures et générations. Sur scène, Elsa Debefve, Colin Jolet et Fujio Ishimaru se redécouvrent et dansent leur histoire, un récit intime qui porte en lui une touche d’universalité. D’une grande qualité artistique « Yosh » - comme "c’est d’accord, prêt, bon, bien, c’est parti..." en japonais - enchante par la présence scénique des comédiens danseurs. Celle de Fujio, fondateur du théâtre de l’E.V.N.I - esprit volant non identifié -, est bien connue des amateurs de jeune public, avec sa bouille d’enfer, son sens du mime et du comique innés. Martiale, sa danse apaise et encense. Colin Jolet, lui, rompu à l’art de la capoeira, a créé son propre langage chorégraphique, maîtrisé et racé pendant qu’Elsa Debefve, issue de la danse contemporaine, irradie. Dès lors, quand ces trois-là se portent, s’emportent, s’échangent, s’enroulent et se racontent au corps à corps, la magie opère. Un parfum d’humanité enivre l’élégance de leur danse et chacun, petit ou grand, est touché. Qu'il sache ou non qu'il s'agit de souvenirs, de ce temps où Fujio Ishimaru donnait cours de mime aux artistes du théâtre de Galafronie. Il s’est installé près de chez eux, a posé quelques tatamis au sol, une radio qui égrenait de la musique orientale et a partagé leur quotidien ainsi que celui des Jolet, de la compagnie de la Casquette. De leur côté, Elsa Debefve et Colin Jolet ont été élevés comme frère et sœur puisque leurs parents étaient voisins, amis et artistes. Fujio les a vu grandir et aujourd’hui, danse avec eux. (L.B.)

« Yosh » par le Théâtre de l’Evni, créé à Huy aux Rencontres théâtre jeune public 2013. Sera à l’Eden du 26 au 29/4 /2015 dans le cadre de la saison de Charleroi/Danses.

par le Théâtre de l'E.V.N.I.

Pourquoi j'ai tué Pierre

/web/photos/2014.Pourquoi2_NicolasBomal.pngOlivier, 12 ans, vit une enfance heureuse, dans une famille baba-cool et l’atmosphère libertaire de mai 68. Un été, il part en colonie de vacances, encadré par Pierre, un curé bon enfant, très ouvert d’esprit, et ami de la famille. C’est le moment des premiers émois amoureux, de la découverte du corps des filles. Mais tout va basculer, en une nuit, entraîné par le curé dans des attouchements sexuels. Une nuit, quelques minutes de honte ultime, et c’est toute son existence qui en sera entachée. « Un enfant, c’est comme de la pâte à modeler : on pose la main et l’empreinte reste, » résume-t-il. On suit Olivier au fil des ans. Il se marie, a des enfants, trouve du boulot, mais toujours, cette blessure d’enfance lui pollue la tête. Une rencontre et un livre le guideront sur le chemin de la reconstruction psychologique : il creuse, fouille, vomit tout, et ira jusqu’au bout, jusqu’à la confrontation, des années après, avec Pierre. Si la pièce envoûte à ce point, c’est qu’elle est portée par une mise en scène diablement construite. Jean Vangeebergen a la bonne idée d’éclater le monologue du jeune garçon en trois comédiens, Julie Duroisin, François-Michel Van Der Rest et Sylvain Daï, tous excellents. Du coup, l’histoire rebondit sans relâche, assaisonnée de ludiques extraits musicaux – du Pollux du Manège enchanté à Britney Spears en passant par Guesch Patti – pour situer les événements dans le temps. Si quelques passages, dont le fameux viol, sont d’une glaçante sobriété, l’ensemble court plutôt sur un fil enjoué, tirant vers le positif plutôt que vers le sinistre. L’exercice était périlleux mais le résultat est crépitant. C.Ma.

« Pourquoi j'ai tué Pierre » ,Création aux Rencontres de Théâtre Jeune Public de Huy. Une production de la compagnie Transhumance. A Tournai le 25 février

par la Cie Transhumance