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Frankenstein

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Jan Christoph Gockel est un metteur en scène allemand. En compagnie de son complice Michael Pietsch, facteur et manipulateur de marionnettes, il adapte au théâtre une œuvre mythique de la littérature anglaise, Frankenstein ou le Prométhée moderne. Contrairement à ce que nous pouvons lire chez Mary Shelley, la créature qui prend vie sur le plateau n’est pas composée de morceaux de squelette. Dans ce spectacle, le monstre de Frankenstein est une marionnette de six mètres de haut, composée d’objets de récupération. Plusieurs collectes ont été réalisées auprès du public à Bruxelles. Livres pour enfant, montres, toiles de maître, chaque objet est porteur d’une histoire intime, celle de son ancien propriétaire. Frankenstein s’inspire donc du mythe, mais c’est l’histoire d’une communauté qui est racontée.

Entouré par les acteurs, les objets et les marionnettes, Anton Berman joue en live la musique du spectacle. Le compositeur voyage d’un clavier à l’autre. La sonorité frêle d’un piano jouet tranche avec les basses profondes d’un synthé et nous plonge dans les instants les plus sombres de la pièce. Sur le plateau, la créature mise en mouvement par des câbles, découvre une série d’objets néfastes à l’arrière de son crâne. Certains d’entre eux évoquent la pédophilie en Belgique, d’autres renvoient au nationalisme en Allemagne. C’est pourquoi Frankenstein veut se débarrasser de sa créature et qu’une confrontation va naître entre les acteurs sur le plateau est cette marionnette de six mètres de haut. Fr.C

Frankenstein, De Jan Christoph Gockel. D’après Frankenstein; Or, The Modern Prometheus» de Mary Shelley. Scénographe Julia Kurzweg Créateur marionnettes & marionnettiste Michael Pietsch Création Costumes Emilie Jonet Création son & musicien Anton Berman Créateur lumière Jean-Jacques Deneumoustier. Créé au Théâtre National. Coproduction Théâtre de Namur, Tandem scène nationale, le Manège Maubeuge, Shelter Prod

 

 

de Jan-Christoph Gockel

Le livre de la jungle

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Revisiter un classique avec élégance n'est déjà pas chose aisée. Alors réussir une œuvre scénique tout public en s'appuyant sur la notoriété d'un tube du dessin animé mais sans s'accrocher aux gimmicks de ce dernier, c'est un véritable défi. 

Avec des vrais morceaux de Thierry Debroux dedans (son adaptation de Rudyard Kipling emprunte des détours vers sa propre enfance et la naissance, à travers cette œuvre justement, de son goût pour le théâtre) et l'allant de Daphné D'Heur à la mise en scène, Le Livre de la jungle, version Théâtre royal du Parc, se la joue comédie musicale assumée, dont Philippe Tasquin (qui par ailleurs campe un Kaa cocasse et décalé) signe les compositions et les arrangements. Élégante, efficace, la musique évite toute trop grande proximité avec les airs connus, contribuant ainsi à détacher l’ensemble de la référence Disney (hormis le clin d'œil - l'un des rares - de Mowgli, le petit d'homme culotté de rouge et le cheveu rebelle) pour gagner sa propre identité, tant sonore que visuelle.

Or en matière d’images, le Parc sait rassembler les talents. Scénographie (Catherine Cosme), vidéos (Allan Beurms) et lumières (Philippe Catalano) sculptent un écrin poétique et changeant pour les aventures qui s’y jouent, habilement costumées (Chandra Vellut) et masquées (Geneviève Périat)..

Ainsi se succèdent et se croisent, sur le plateau, au gré des tableaux, une institutrice, un mentor, une louve maternelle, un serpent sournois et farceur, un ours bonhomme et taquin... Une foule de figures et leurs interactions pour souligner - avec gaîté et émotion - combien toute vie se construit des rencontres qui la jalonnent. Entre bienveillance et obstacles, entre doutes et convictions, entre chagrins et allégresse. 

Emblématique du théâtre aussi bien, le message du spectacle se colore de toutes les disciplines combinées pour en faire une proposition résolument transgénérationnelle. M.Ba.

Le Livre de la jungle, d’après Rudyard Kipling, mise en scène de Thierry Debroux et Daphné D’Heur

Musique : Philippe Tasquin, Scénographie : Catherine Cosme, Masques et maquillages : Geneviève Périat et Florence Jasselette, Costumes : Chandra Vellut, Lumières: Philippe Catalano, Vidéos : Allan Beurms, Son : Marco Gudanski, Choeurs : Pierre Bodson, Chorégraphies : Antoine Guillaume, Décor : Aline Claus et Isis Hauben, Travail corporel : Isabelle Beirens. Créé au Théâtre royal du Parc

de Thierry Debroux et Philippe Tasquin

Chambarde

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C’est un objet théâtral curieux, entre peinture mouvante, performance et opéra. Une sorte de défi au " bon sens " réaliste et un manifeste pour l’abstraction au théâtre. Casse-gueule ? Oui mais ça tient la route. Tellement beau qu’on en redemande… si on entre dans ce jeu de lenteur très calculée où il n’y a pas de place pour l’improvisation. Étonnante performance d’une planche en équilibre instable qui vous accroche accumulant les sens, ou pas. La scène du balcon de Roméo et Juliette de Shakespeare est bien là mais ‘déstructurée’, portant non pas sur l’amour mais sur la relativité du nom de Roméo. Nicolas Mouzet Tagawa veut ’chambarder’, renverser l’équilibre, non pas social ou politique du monde (ou alors comme métaphore), mais les habitudes de la convention théâtrale qui placent l’acteur au centre et la scénographie à son service. Ici renversement paradoxal puisque les deux acteurs (Nicolas Pastouraux, Jean-Baptiste Polge) et deux actrices (Claire Rappin et Eline Schumacher) acceptent d’être des ‘ombres’, porteuses de voix, dans un beau tableau. alors que le décor mouvant devient le principal acteur, créant l’action, l’orientant, lui donnant son rythme par une création musicale insinuante, pleine de références savantes et populaires, comme les textes.

Nicolas Mouzet Tagawa a été éducateur d’enfants autistes et ça nous rappelle le fameux Regard du Sourd de Robert Wilson (dans les années70 !) ou une atmosphère à la Maeterlinck, un clair-obscur angoissant. On le sent doué pour le théâtre comme pour l’opéra. À suivre, comme on dit. Chr.J.

Chambarde de Nicolas Mouzet Tagawa, créé au Théâtre les Tanneurs


 

 

 

de Nicolas Mouzet-Tagawa